Communautique assistait à la conférence du Dr. Patricia Aufderheide, professeure et directrice du Centre sur les médias sociaux à l’école de communications de l’American University à Washington, dans le cadre du Séminaire de Marc Raboy  sur la Radiodiffusion Canadienne qui avait lieu à l’Université McGill le 16 novembre dernier.

Le Dr. Aufderheide a souligné la nécessité de comprendre l’argument économique en cause dans le dossier de la neutralité de réseau,un concept selon lequel les architectures et les opérateurs de réseaux ne devraient pas effectuer de discrimination entre les applications utilisant ces réseaux (Wikipédia). La neutralité fait référence à permettre ou non aux différents acteurs d’un réseau de faire passer en priorité certains contenus au détriment d’autres, considérés comme moins importants.

On trouve d’un côté les géants des télécommunications (AT&T, Verizon, etc.) qui cherchent à protéger leurs modèles d’affaires existants, axés sur l’infrastructure physique et l’accès à celle-ci. De l’autre côté, on trouve les représentants de la nouvelle économie, ayant des modèles d’affaires axés sur le contrôle du contenu (Google, Microsoft, Yahoo, etc.) Avec des changements dans les habitudes des utilisateurs comme, par exemple, la migration de la consommation de télévision par câble vers la consommation de vidéos en ligne, le premier groupe se voit perdre le contrôle sur le contenu ; ce qui l’amène à revoir son modèle d’affaire.

Selon le Dr Aufderheide, la société civile se doit d’éviter les deux axes de propagande mis de l’avant par les deux camps et de prendre activement position vis-à-vis de la problématique. La voie la plus efficace d’implication réside dans les politiques des télécommunications qui ne sont pas encore la chasse gardée des lobbyistes comme l’est la loi, aux États-Unis à tout le moins.

Pour être efficace, il est impératif pour une politique publique d’être avant tout applicable. La conférencière soutient qu’Internet n’a jamais été complètement neutre, que depuis ses débuts, le trafic y est l’objet de discrimination et que sans l’appui de ces mécanismes de priorisation du trafic, Internet « planterait ».  Il est inutile d’élaborer des politiques déterminant comment devrait fonctionner les logiciels de priorisation du trafic à l’intérieur même des murs de AT&T, si personne n’a accès à ces logiciels à part AT&T. Les véritables questions à se poser sont : «Quelle doit être la structure des communications ?» et «Qu’est-ce qu’un espace public ?».

Le Dr. Aufderheide déplore que les efforts qui ont été faits pour défendre les intérêts de la société civile ont été orchestrés, en majeure partie jusqu’à maintenant, par des tenants du mantra «l’information veut être libre». Ceci dit, le Dr. Patricia Aufderheide se défend bien de prétendre connaître la position que doit prendre la société civile à l’intérieur du débat.

Cette position contraste avec plusieurs des interventions faites dans le cadre du « Alternative Telecommunications Policy Forum » auquel Communautique a assisté via vidéodiffusion.  Plusieurs des intervenants à ce forum ont pris fermement position en faveur du concept de neutralité de réseau.